Si Dieu était un chanteur, il aurait la voix de James Douglas Morrison.
À chaque fois que je vais au Père Lachaise, je me fais un devoir de me recueillir sur sa tombe. Quand bien même le célèbre cimetière abrite parmi les plus grands esprits de ces cinq derniers siècles, c’est la tombe du chanteur de l’éternel This is the End qui est la plus fleurie et qui fait l’objet de la plus grande dévotion.
Ma première rencontre avec son texte et avec sa voix se fit à travers l’inoubliable chef-d’œuvre de Coppola : Apocalypse Now. Qui ne se souvient pas de la scène d’ouverture avec le son des rotors de l’hélicoptère qui épouse parfaitement la guitare de Robby Krieger, Martin Sheen allongé sur le lit d’un hôtel miteux, son pistolet sur la table de chevet et puis soudain, ces paroles : « This is the end… my only friend… the end ! » ?
Ensuite, je le rencontrai à nouveau dans un autre film, Lost Boys, de Joel Schumacher, qui est bercé tout le long par People are strange. Le réalisateur fait même un clin d’œil au chanteur en accrochant son affiche dans l’antre de cette « génération perdue ».
Enfin, il eut le biopic d’Oliver Stone, sobrement intitulé The Doors et l’interprétation d’un Val Kilmer plus vrai que nature dans le rôle de Morrison.
Il eut l’idée du titre de son groupe en lisant Aldous Huxley : The Doors of Perception ; l’écrivain britannique lui-même fut inspiré par William Blake et son recueil The Marriage of Heaven and Hell.
Jim Morrison peut être considéré comme le Rimbaud de la chanson. En effet, tout comme l’auteur du Bateau ivre, il atteint les sommets de son art jeune, et puis, soudainement, comme si le génie avait horreur de la durée, il décide de tout abandonner. Comme Rimbaud, il traverse les eaux pour explorer d’autres contrées. Comme lui, il a assis la beauté sur ses genoux et l’a trouvée amère ! Mais si l’homme aux semelles de vent eut suffisamment de temps pour s’inventer une nouvelle vie, Morrison, lui n’eut pas cette chance… ou plutôt cette malchance !
En 1971, après avoir pris de l’embonpoint, il quitta le pays qui l’avait tant encensé et qui en même temps l’avait temps mécompris, pour se rendre en France où il avait décidé de « juste » écrire des poèmes. Mais un soir, on le retrouva mort dans sa baignoire. Et comme pour faire un dernier pied de nez aux Etats-Unis, il s’éteint la veille de la fête d’indépendance, le 3 juillet. On a conclut à une overdose. Le dernier des romantiques s’en est allé.
Mais son fantôme est toujours présent. Certains prétendent même qu’il serait encore en vie, et à chaque fois qu’à Paris, au détour d’une ruelle, je croise un vieil homme d’une soixantaine d’années, assis sur un banc, gribouillant sur un carnet, je me plais à rêver que j’ai peut-être en face de moi l’homme qui a chanté, de sa voix de baryton : « Ride the snake, ride the snake/ To the lake, the ancient lake, baby/ The snake is long, seven miles/ Ride the snake...he's old, and his skin is cold »…
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