« Un peu de mon corps est passé dans mon texte. » - Montaigne



L’activité d’écrivain est pulsion de mort, et l’écrivain est un être-pour-la-mort. On se dépouille soi-même pour créer d’autres soi-même, que ce soit de la littérature de fiction ou des idées.

Toute littérature est littérature de fiction, de friction. Le lecteur se frotte à l’auteur. Ce dernier doit le démanger. C’est comme dans la tectonique des plaques ; c’est le glissement entre une plaque supérieure et une plaque inférieure qui fait dériver les continents du lecteur et de l’auteur. Et l’on reconnaît que c’est puissant, quand cela donne lieu à des éruptions volcaniques ou des raz-de-marée dans la tête du lecteur.



Certes, le lecteur préfère parfois des mers calmes pour naviguer ; cela est plus propice aux rêves. Il choisira ainsi plutôt d’embarquer à bord de l’Hispaniola avec Jim Hawkins et aller à la recherche d’un trésor bien réel en espèces sonnantes et trébuchantes au lieu de grimper sur le Pequod du capitaine Achab en quête d’une obsession métaphysique.

Quant à l’auteur que je suis, j’invite le lecteur, je le contrains même, à un voyage cauchemardesque et je lui cris : Chassons-la cette maudite baleine blanche !

Ne m’appelez pas Jim Hawkins… Appelez-moi Ishmael !



La sodomie est l’acte sublime par excellence car il vient bousculer les trois monothéismes qui ont sacralisé l’acte sexuel et en ont fait une téléologie en vue de la procréation.

La sodomie incarne la « surprise », un phénomène violent à la dérobée.

Il faut prendre le lecteur par derrière et la lui mettre bien profond.


Thursday 24 March 2011

Et si… Alexandre le Grand n’était pas mort à 33 ans à Babylone ?

Et si… Alexandre le Grand n’était pas mort à 33 ans à Babylone ?


Dans l’antiquité, la légende disait que le jour où le temple d’Artémis à Ephèse serait détruit, cela annoncerait la chute de toute l’Asie. Selon Plutarque, Alexandre le Grand naquit le même jour où Erostrate (qui sans doute allait inspirer Mishima 2300 ans plus tard pour son Pavillon d’or) incendiait le sanctuaire de la déesse de la chasse.
Nous sommes le 21 juillet de l’an 356 avant notre ère.

Alexandre a tellement pénétré l’inconscient collectif qu’on a du mal à croire qu’il ait été un personnage réel et non un héros homérique. Car c’est justement chez Homère qu’il puisait sa plus grande inspiration, et notamment dans L’Illiade. On raconte qu’il (dans cet article les assertions seront souvent mises au conditionnel étant donné qu’à propos du jeune roi macédonien il est si difficile de démêler le vrai du faux, la réalité du mythe) emportait toujours avec lui, lors de ses campagnes, un exemplaire du livre décrivant la guerre de Troie… annoté par Aristote lui-même !
Ça a de la gueule !

Car en effet, Aristote fut son précepteur. Mais comme souvent chez les grands hommes, ce n’est pas la reconnaissance qui les étouffent puisque plus tard, il fera exécuter le neveu du fondateur du ‘Lycée’, accusé d’avoir fomenté un complot à son égard pour l’assassiner.
Quand le plus grand chef militaire de l’antiquité a comme professeur le plus grand philosophe de l’histoire, cela ne peut mener qu’à la conquête du monde connu.

C’est en effet l’auteur de La Politique qui dès son plus jeune âge l’encouragea à aller toujours vers l’est, reconquérir les cités grecques tombées sous le joug perse, les perses qu’Aristote (eh oui ! personne n’est parfait) assimilait à de la flore et de la faune… dont Alexandre constatera le mensonge quand il entrera dans Persépolis, merveille des merveilles.

Mentionnons, pour l’anecdote (même si l’anecdote chez les grands révèle un trait de caractère déterminant dans leurs destins) qu’il avait parfois pour habitude de demander à Aristote de faire le cheval et lui grimpait alors dessus.

Alexandre donc, après que son père Philippe II lui ait dit : « La Macédoine est trop petite pour toi, il te faut aller vers d’autres contrées » et une fois que celui-ci fut assassiné dans d’étranges circonstances (la coupable idéale est toute trouvée, l’épouse délaissée, Olympias), Alexandre, maintenant roi et à la tête des puissantes phalanges héritées de son père, décide de combattre Darius III, souverain de la Perse, rois des rois. Trois batailles seront décisives, Granique, Issos et enfin Gaugamèles ; Alexandre, à la tête d’une armée d’environ 50,00 hommes franchit l’Euphrate et le Tigre pour combattre la puissante armée perse qui comptait, selon la légende, un million de soldats (mais ces chiffres mériteraient d’être divisés par deux ou trois). Après la victoire macédonienne, Darius s’enfuit. Alexandre devient maître du monde… du moins, du monde connu par les Grecs.

Mais justement, les rêves d’Alexandre ne s’arrêtent pas à la géopolitique que lui a enseignée Aristote. Il veut conquérir, non plus seulement pour assurer la prospérité de la Grèce, mais pour le seul fait de conquérir et de découvrir.

Hélas, ses soldats ne seront pas aussi rêveurs que lui. Leurs seuls rêves se résument à rentrer chez eux et retrouver leurs familles après dix longues années de campagnes militaires. De plus, la révolte gronde au sein de l’armée du jeune roi. Beaucoup de ses soldats, y compris certains généraux, reprochent à Alexandre de trop ‘fraterniser’ avec l’ennemi, et de vouloir se faire adorer comme un Dieu ainsi que d’oublier un peu vite ce qu’il leur doit.

Alexandre, comme tout grand homme est irascible, et un soir, sous l’influence de l’alcool, il se laissera emporté et tuera un de ses plus proches amis, Cleithos.
Il ne se remettra jamais vraiment de cette infamie.

Après l’Inde, c’est vers l’Arabie qu’il jette son dévolu.

Mais il mourra à Babylone, à 33 ans. Selon Quinte-Curce, d’une fièvre.

Il est intéressant de remarquer qu’à l’exception de quelques uns, peu de grands chefs militaires sont morts au combat. Même césar, c’est au Sénat qu’il fut assassiné. Ni Hannibal, qui se donna la mort pour ne pas être fait prisonnier par les romains, ni Gengis Khan ou bien même Napoléon ou Rommel ne sont morts les armes à la main.

César, dit-on, devant une statue d’Alexandre à Cadix en Espagne, sanglotait. Quand un légionnaire lui demanda la raison de telles plaintes, il répondit : à mon âge, il avait conquis la moitié du monde connu, et moi, qu’ais-je encore fais ?

Hégésias de Magnésie, historien grec du 3ème siècle de notre ère et auteur d'une biographie d'Alexandre, déclara à propos de l’incendie du temple d’Artémis: on comprend que le temple ait brûlé, puisque Artémis était occupée à mettre Alexandre au monde !

M.K. SABIR

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