« Un peu de mon corps est passé dans mon texte. » - Montaigne



L’activité d’écrivain est pulsion de mort, et l’écrivain est un être-pour-la-mort. On se dépouille soi-même pour créer d’autres soi-même, que ce soit de la littérature de fiction ou des idées.

Toute littérature est littérature de fiction, de friction. Le lecteur se frotte à l’auteur. Ce dernier doit le démanger. C’est comme dans la tectonique des plaques ; c’est le glissement entre une plaque supérieure et une plaque inférieure qui fait dériver les continents du lecteur et de l’auteur. Et l’on reconnaît que c’est puissant, quand cela donne lieu à des éruptions volcaniques ou des raz-de-marée dans la tête du lecteur.



Certes, le lecteur préfère parfois des mers calmes pour naviguer ; cela est plus propice aux rêves. Il choisira ainsi plutôt d’embarquer à bord de l’Hispaniola avec Jim Hawkins et aller à la recherche d’un trésor bien réel en espèces sonnantes et trébuchantes au lieu de grimper sur le Pequod du capitaine Achab en quête d’une obsession métaphysique.

Quant à l’auteur que je suis, j’invite le lecteur, je le contrains même, à un voyage cauchemardesque et je lui cris : Chassons-la cette maudite baleine blanche !

Ne m’appelez pas Jim Hawkins… Appelez-moi Ishmael !



La sodomie est l’acte sublime par excellence car il vient bousculer les trois monothéismes qui ont sacralisé l’acte sexuel et en ont fait une téléologie en vue de la procréation.

La sodomie incarne la « surprise », un phénomène violent à la dérobée.

Il faut prendre le lecteur par derrière et la lui mettre bien profond.


Friday 1 April 2011

Apocalypse Now, de Francis Ford Coppola

Selon Godard, seul un roman médiocre peut permettre une bonne adaptation cinématographique… beaucoup d’exemples viennent le contredire. Pensons, entre autres à l’adaptation que fit Kubrick du Lolita de Nabokov ou encore du Barry Lyndon de Thackeray. Souvenons-nous aussi de Madame Bovary que Chabrol porta à l’écran ou même au Blade Runner de P. K. Dick que Ridley Scott adapta magnifiquement.

Mais la meilleure adaptation cinématographique à ce jour d’une œuvre littéraire reste celle, très libre, de Coppola d’après le chef-d’œuvre de Conrad, Heart of Darkness, et qui lui valu la Palme d’or à Cannes en 1979.
    
Tous ceux qui ont vu le film, même s’ils n’ont pas tous compris à l’histoire, se rappellent au moins quelques scènes d’anthologie.
La première, c’est le début, sur fond de This is the end des Doors, où le bruit du ventilateur de plafond se confond avec celui des rotors.
La deuxième, c’est la « guerre psychologique » déclenchée par le Lieutenant Colonel Bill Kilgore (Robert Duvall), quand il met La chevauchée des Valkyries à fond lors de l’attaque des hélicoptères.
La troisième, c’est quand ce même Bill Kilgore (amalgame de ‘kill’ et de ‘gore’) dit aimer sentir l’odeur du napalm au petit matin.
La dernière, enfin, c’est la rencontre entre le Capitaine Willard (Martin Sheen) et le Colonel Kurtz (Brando dans son plus grand rôle) et que celui-ci déclare : « Nous devons les tuer. Nous devons les incinérer. Porc après porc. Vache après vache. Village après village. Armée après armée, et ils me traitent d'assassin ! Comment dit-on lorsque des assassins accusent un assassin ? »

Quand Willard remonte le fleuve pour aller vers Kurtz, c’est en même temps sa propre psychologie qu’il remonte… à rebours. C’est une plongée dans l’innommable et dans l’absurde. Absurde, parce qu’il est chargé par ceux-là mêmes qui mènent une guerre où l’on assassine, torture et viole des civils de retrouver et d’exécuter un officier dont les méthodes sont considérées comme immorales. C’est l’hypocrisie à son apogée. Seuls ont le droit de tuer ceux qui ont été dûment accrédités par la hiérarchie. Ce n’est pas le fait qu’il se prenne pour un Dieu qui dérange les autorités, c’est le fait qu’il se soit rebellé contre ses supérieurs.

Apocalypse Now a ceci de bouleversant, tout comme l’ouvrage de Conrad, qu’il nous met face à nos propres limites morales. Il nous confronte à l’envers de notre psychologie. La guerre est ce moment « privilégié » où l’on se découvre, où tout est permis du moment où l’on porte un uniforme, et en s’affranchissant de cette morale militaire et en revêtant une morale absolue qui est celle du ‘surhomme’, Kurtz nous prévient : Vous aussi, vous en êtes capables !

Tout comme Impitoyable de Eastwood n’est pas un western, Apocalypse Now n’est pas un film de guerre. La guerre n’est là qu’en toile de fond pour montrer comment des hommes ordinaires, confrontés à des situations extraordinaires, se transforment pour basculer dans l’horreur ! L’horreur ! Comment, quand on regarde au fond des abymes, les abymes aussi regardent au fond de nous.

L’Exorciste, de William Friedkin

Il est plus excitant de regarder des pornos amateurs que des films érotiques réalisés par des professionnels ! Où est-ce que je veux en venir, devez-vous vous demander, puisque je suis censé parlé de films d’horreur et non de cul ?
Eh bien ! c’est tout simple, ce qui est proche de nous nous affecte plus ! C’est presque une lapalissade que de le dire.
Dans des films érotiques amateurs, on se dit que ça peut être notre voisine, ou la collègue du bureau, ce qui emballe davantage l’imagination puisqu’il nous serait peu accessible d’approcher une véritable star de l’industrie du X. Et puis, les maladresses du film amateur nous renvoient aux nôtres propres. La maison dans laquelle le tournage se déroule pourrait être notre maison, et ainsi de suite.
Bref, il y un phénomène d’identification qui se produit, ou, pour parler en langage aristotélicien, de mimesis.

C’est ce qui se passe dans le film de William Friedkin. Ça fait peur parce que ça pourrait nous arriver !

Le succès du film est dû à sa « proximité ». Il ne s’agit pas d’un monstre dans un vaisseau spatial, ni d’un gars avec une tronçonneuse ou encore d’un mutant venu d’une autre planète. Le film parle d’une jeune fille normale, dans une famille normale, dans des situations normales… à qui il arrive des choses paranormales.

Et on flippe davantage quand on sait que le film s’inspire d’une histoire vraie !

Déjà, le film s’ouvre sur une scène en Irak, et la première chose que l’on entend, c’est l’appel à la prière du muezzin. Ainsi, nous rencontrons une première religion, l’Islam. Le père Merrin (interprété par le magnifique Max Von Sydow, qui avait déjà touché au paranormal avec Le Septième sceau d’Ingmar Bergman) fait des fouilles sur le site archéologique de Hatra, près de Ninive. Il y découvre la statue d’une ancienne divinité assyrienne, Pazuzu. La deuxième religion à laquelle nous faisons face est la religion babylonienne. Au même moment, le père Karras, à Washington D.C. doute de sa foi. Et c’est au tour du catholicisme de faire son apparition.

Ce que le réalisateur veut nous faire comprendre par cette introduction, c’est que le mal est intemporel et universel, qu’il traverse toutes les religions, tous les lieux et toutes les époques.

Le film résiste au passage des années. Plusieurs générations font les mêmes cauchemars après avoir visionné le film.

Le film ne contient aucun « message », ce qui est le propre d’un grand film. Il produit des effets sur le spectateur, il le bouscule et l’interroge.

Souvent imité, mais toujours inimitable, ce chef-d’œuvre du réalisateur de French Connection est à voir et à revoir… pour la simple et bonne raison qu’il remplit sa fonction de film d’horreur : IL FAIT PEUR !

Darwin à Maurice

Le 9 mai 1836, Charles Darwin, à bord du HMS Beagle quitte Port-Louis.

Il est assez paradoxal qu’un pays comme le nôtre qui, à sa manière, a contribué à la naissance de la théorie de l’évolution, soit aussi pétrie de pensée religieuse et si rétive à admettre que la place de l’homme sur terre n’a rien d’exceptionnelle et que ce n’est pas une puissance supérieure qui nous a fait tel que nous sommes, mais bien plutôt la sélection naturelle.

Dieu a fait l’homme à son image… ce à quoi Prévert répond : dans ce cas, l’exhibitionniste lui rend hommage !

Parfois, certains hommes naissent, non pour réconforter l’humanité, mais pour lui faire mal, lui causer des blessures, dont les plus sérieuses sont des blessures narcissiques. Celles-ci, jusqu’ici du moins, sont au nombre de trois : il y eut celle infligée par Copernic, la terre n’est plus le centre de l’univers, celle produite par Freud, le ‘conscient’ n’est plus le centre de la vie psychique de l’homme, et entre les deux, on a la plus grave, celle dont l’homme ne s’est pas encore remis, et parfois, ne veut toujours pas y croire, causée par Darwin, l’homme n’est plus le centre de la vie. Il n’est qu’un animal comme les autres, un organisme parmi d’autres organismes.

De nos jours, la théorie de la sélection naturelle semble être sur le recul dans beaucoup de pays, et non des moindres, comme aux Etats-Unis, où le ‘créationnisme’ revient en force. Et qu’en est-il dans le nôtre ? Demandez aux Mauriciens ce qu’ils en pensent ; ils viendront pour la plupart avec deux réponses, la première stupide, la seconde, plus méprisante, lâche intellectuellement. Les uns répondront qu’ils n’y croient pas, que c’est Dieu ou les Dieux qui ont fait l’homme, que celui-ci est au-dessus des autres espèces animales et toute la rhétorique habituelle qui va avec. Les autres diront, que oui, ils l’ont étudié à l’école, ils y ‘croient’ (comme si c’était une question de ‘croyance’) mais qu’en dépit de cela, ils considèrent que Dieu(x) existe(nt) et qu’il existe un paradis, un enfer, une morale et autre idées tout aussi farfelues, dignes des contes de fées et qui, au même titre, que les farfadets et les licornes, relèvent de la légende ou des superstitions.

Darwin n’était pas un génie, au sens où on l’entend généralement, c’est-à-dire doté d’un QI monstrueux, mais il était courageux intellectuellement ; il avait ce que Hölderlin appelait le ‘Aussicht’, la vue, cette lucidité  qui, selon le poète René Char, est la blessure la plus proche du soleil. Il a osé aller à contre courant de la pensée religieuse de son époque, lui pour qui la religion n’était qu’une « stratégie tribale de survivance ». Il a fait table rase des valeurs et de la connaissance de son temps pour élaborer une théorie est allé jusqu’au bout de la logique de celle-ci.

Toutefois, aucune connaissance n’est figée dans le marbre et ce ne serait pas faire justice à Darwin que de le ‘déifier’ et ne pas remettre en question ses analyses, ce que malheureusement les scientifiques d’aujourd’hui sont enclins à faire. Sans quoi, on tomberait dans le mal que l’on dénonce, car qu’est-ce que la religion sinon une inclinaison à dogmatiser et essentialiser les hommes et le savoir ?

Aujourd’hui encore, même ceux qui adhèrent aux analyses de Darwin n’en tirent pas toutes les conclusions, la seule qui soit logique : si l’homme est un être naturel, ‘perdu’ dans la sélection naturelle, alors, plus rien n’existe ! il n’y a pas de « droits de l’homme », « d’amour », de « morale » !

On ne pardonnera jamais à Darwin ceci : d’avoir banalisé notre espèce.

MK Sabir

Unforgiven, de Clint Eastwood

« Le mérite n’a rien à voir dedans ». Cette phrase de la scène finale de ce western crépusculaire n’a jamais cessé de me poursuivre depuis la première fois que je l’ai entendue.

Il y a quelque chose de troublant dans une telle affirmation ; quand vous y réfléchissez, un profond sentiment de malaise vous envahit… vous essayez de vous retenir aussi longtemps que possible, comme un pet que vous retiendriez mais finalement ça sort, et l’odeur qui s’en dégage et nauséabonde ! Oui ! Vous vous posez finalement la question : et si c’était vrai ? Et si dans la vie, ce que l’on gagne et ce que l’on perd, bref, ce qui nous arrive, n’avait rien à voir avec ce que l’on mérite.

Les choses passent inéluctablement.
Il n’y a pas de combat entre le bien et le mal. Pas de guerre entre les forces de la lumières et les forces obscures.
Les choses se passent juste. Inéluctablement.

À quoi cela sert-il alors d’être « bon » ? Peut-on seulement être « bon » ? Ou alors, n’est-ce qu’un mot ? un mot parmi donc ? un mot comme un autre mot, un mot qui n’aurait pas plus de valeur que le mot « miel » ou « table » ?

Serait-il possible de vivre une telle vie quand nos notions les plus élémentaires volent en éclats, que la terre de nos valeurs primordiales, celles-là même qui nous ont construites toute notre vie, se dérobe sous nos pieds ?

Ce film réalisé et interprété par Clint Eastwood, avec à ses côtés un tout aussi remarquable Gene Hackman, n’est pas un western. En effet, un western, comme on l’entend au sens classique, possède des codes bien déterminés : l’incarnation de l’ordre (comme la figure de Wyatt Earp), des ennemis définis clairement (les Indiens ou les braqueurs de banques) et un héros qui fait partie intégrante de la nation et qui défend les valeurs morales de celle-ci (John Wayne). Rien de tout cela dans Impitoyable (le titre français du film) !

Dans le film, personne n’est immoral- chacun possède une bonne raison pour agir comme il le fait ; chacun possède sa part d’ombre et sa part d’innocence.

Quand William Munny place le canon de son fusil dans la bouche de Little Bill et que celui-ci le supplie de l’épargner et lui rappelle qu’il est en train de construire sa maison (ce qui émeut encore plus car on a l’image d’un homme qui a un projet et qui ne se contente pas seulement de vivre) et que Munny, qui avoue avoir tué des hommes, des femmes et des enfants et à peu près tout ce qui marchait, lui lance : « le mérite n’a rien avoir dedans », on bascule alors dans un monde nihiliste et on se retrouve face à nous-mêmes, face à nos démons.

La pensée, la vraie, ne peut être qu’impitoyable.

Un thé au Sahara, de Bernardo Bertolucci

Le film le plus sensuel qu’il m’a été donné de voir.

Pour les Occidentaux, c’est la forêt qui est le lieu mystique par excellence (comme en témoigne par exemple un Meister Eckhart), alors que pour les orientaux, c’est le désert.

Depuis Jules et Jim, le triangle amoureux est un thème récurrent au cinéma ; mais le film de Bertolucci prend le dessus sur celui de Truffaut pour deux raisons principalement.

La première, ce sont les grands espaces ! N’oubliez pas, nous sommes au cinéma, et chaque art doit puiser dans tout ce qu’il a à nous offrir. Si vous voulez voir deux personnages dans un lieu clos, n’allez pas dans les salles obscures, allez au théâtre ! C’est aussi une des raisons qui fait de There will be blood (dont nous traiterons ultérieurement sous cette même rubrique) un chef-d’œuvre. La nature, au cinéma, fourni non seulement une profondeur de champ visuel, mais aussi psychologique ; elle occupe, pour ainsi dire, la même fonction que le divan pour le psychanalyste. Elle permet au spectateur de se « laisser aller », de se fondre dans le décor.

La seconde, c’est le nihilisme apparent de Port et Kit Moresby, les deux personnages de l’histoire. Leur voyage est un voyage à travers l’espace mais en même temps à travers l’abîme de leur psychologie. Ils prétendent venir en Afrique pour ressourcer leur couple, mais on comprend vite que ce n’est pas la raison première ; ils répondent en fait à un appel transcendantal irrépressible. Dès qu’ils descendent du bateau, leurs destins ne leur appartiennent plus, ils se fondent dans quelque chose de plus grand qu’eux, en un lieu où l’Orient et l’Afrique se mêlent et où les Occidentaux ne peuvent faire autrement que de se perdre.
Ce voyage initiatique ne leur apprend pas à mieux se connaître, puisqu’il montre au contraire que l’individu s’efface aux confluents des grands espaces.

Depuis Aristote, on nous apprend qu’une bonne histoire est celle où il y a un personnage qui poursuit un but précis. Une bonne histoire, peut-être… mais pas une ‘grande’ histoire ! C’est quand justement les êtres errent telles des âmes en peine que le spectateur se confronte à ses propres doutes et qu’il est alors amené à s’interroger sur sa propre existence et sur la finalité de celle-ci.

Le sexe, dans le film, suit le même schéma que décrit ci-dessus. Les règles formelles attachées au mariage sont dissoutes et diluées une fois qu’ils foulent le désert. Et ils se donnent à l’un et à l’autre uniquement parce qu’ils sont proches l’un de l’autre. La proximité sentimentale n’existe pas, seule la proximité physique compte. C’est la géographie qui dès lors dessine les contours du désir.

Le film n’a aucun message à nous transmettre, ce qui est justement le propre d’une grande œuvre d’art. Le film ne fait que ‘montrer’. Il montre des êtres, qui ne sont plus des ‘individus’ mais des électrons libres, qui sont projetés l’un contre l’autre, puis l’un en dehors de l’autre. On ne déduit rien de leur parcours, sinon justement que c’est un parcours.

Le livre de Paul Bowles porte le titre original de The Sheltering sky… le ciel protecteur ! Ce qui me permet de terminer par ces vers du beau Hölderlin : nous nous tenions têtes nues sous les orages des Dieux.

When Harry met Sally

Depuis la première fois que j’ai vu le film de Rob Reiner, à chaque fois que je me rends dans un restaurant, je me demande si la fille à l’autre table est sur le point d’avoir un orgasme !

Un film ne passe pas toujours à la postérité pour son contenu profond, pour son jeu d’acteur réaliste mais le plus souvent parce qu’il contient des scènes cultes. Pensons, par exemple, la scène dans Reservoir Dogs, où Mr. Blonde, le personnage interprété par Michael Madsen, coupe l’oreille du policier qu’il a capturé en écoutant « stuck in the middle with you » et veut ensuite lui mettre le feu.
Rappelons-nous aussi la scène finale de Rencontre du troisième type quand l’équipe scientifique jouent un motif musical de cinq hauteurs en mode majeur afin d’essayer de communiquer avec les extraterrestres.
Souvenons-nous enfin de ce chef-d’œuvre de Mel Gibson (mais qui foisonne toutefois d’anachronismes), Apocalypto, où les captifs sont donnés en sacrifice au peuple maya.

Cette comédie avec Billy Crystal et Meg Ryan, contient aussi un dialogue culte, où Harry Burns (Crystal) développe sa théorie selon laquelle il ne peut y avoir d’amitié entre hommes et femmes parce que l’attraction sexuelle fera tôt ou tard son apparition… à moins bien entendu que la femme soit un boudin et que le mec ressemble à un tableau de Picasso.

J’ai souvent exposé cette théorie aux femmes que j’ai rencontré mais rares sont celles qui ont été enclines à l’accepter, tant elles étaient corrompues par le politiquement correcte et la moraline !

Comme souvent, ce n’est pas tant l’histoire qui compte, mais la narration, c’est-à-dire la manière de raconter l’histoire et l’approche qu’adoptent les personnages par rapport aux événements auxquels ils sont confrontés. Dans le film de Reiner (notons que celui-ci a été « victime » d’une caricature dans South Park qui était autant assassine qu’elle était jouissive) un homme (Harry) qui aspire à devenir politicien rencontre de manière récurrente, au fil du hasard (mais le film laisse suggérer plutôt une sorte de destinée comme, si on ose se permettre une telle comparaison, l’on peut en trouver chez Kundera) une femme (Sally), qui elle veut devenir journaliste. Au fil des années, une amitié profonde se développe entre eux deux… jusqu’au jour où ils finissent par coucher ensemble.

Comme chez Woody Allen, la ville de New-York est un personnage en lui-même. Une ville aux liens distendus entre les individus mais, où en même temps, chacun aspire à se rapprocher de l’autre… vainement.

Ce film aurait pu être une comédie sentimentale parmi bien d’autres. Ce qui le range parmi les classiques du genre, c’est le jeu des acteurs et la précision des dialogues qui font souvent mouche.

À noter, que le titre en anglais se conjugue au passé (« met ») alors qu’en français ils se « rencontrent ». De là à y voir une allusion bergsonienne de l’entremêlement temporel serait peut-être exagéré.

Cyrano de Bergerac, d’Edmond Rostand

Il faut deux livres pour apprendre à bien parler : le premier c’est la Rhétorique d’Aristote et le second, Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand.

Cyrano fait partie de ces personnages qui domine la littérature de part leur stature ; il côtoie à ce titre un Hamlet, un Achab ou encore un Julien Sorel.
Cyrano fait partie de ces hommes, pour paraphraser Marc-Antoine dans le Jules César de Shakespeare, devant la tombe de laquelle la nature elle-même se dresse pour crier : il fut un homme !
Enfin, Cyrano fait partie de ces œuvres qui éclipsent leurs auteurs, au même titre que le Frankenstein de Mary Shelley ou le Moby-Dick de Melville.

Le mot « théâtre » vient du grec qui veut dire voir. Et s’il y a bien une pièce qu’il faut voir plutôt que de lire, c’est bien celle-ci. Cyrano n’est pas un personnage en papier. Il est fait de chair et de sang. Il est animé par la passion. Il est jaloux, colérique, tendre et fataliste.
Il laisse à ce médiocre Jean Baptiste Poquelin la paternité de certains de ses dialogues. Laisse à Christian le soin d’être aimé de Roxane. Il laisse cette vie de médiocrité pour monter vers la lune opaline, y retrouver Socrate et Galilée.

Tout est magnifique dans la pièce, et c’est assez rare pour le souligner. Pas une ligne est à retrancher, du début, quand il prend à partie Montfleury, jusqu’à la fin, quand il remercie Roxane d’avoir été cette robe qui a passé dans sa vie. Et tout mon sang se coagule en songeant qu’on puisse y changer une virgule.

Cyrano est une fine lame et qui toujours à la fin de l’envoi, touche ! Mais en fait, c’est un poète, un romantique, égaré au pays des mousquetaires, tout comme Averroès était un grec égaré en pays musulman. Il ne recherche pas de protecteurs, comme tous ces laquais, de Virgile à Voltaire. Lui, concède à ne pas monter bien haut, peut-être, mais tout seul !

Pièce en cinq actes écrit en 1897 par Rostand, qui abandonna le droit pour le théâtre, l’auteur, natif de Marseille, se démarque de la tradition réaliste de l’époque pour accoucher d’une radicale romance historique se déroulant au milieu du 17ème siècle. Le véritable Cyrano a réellement existé, il était un écrivain français, libre-penseur comme on disait à l’époque, c’est-à-dire porté vers l’athéisme et a écrit entre autres une Histoire comique des États et Empires de la Lune à laquelle Rostand rend hommage quand il fait ‘tomber’ Cyrano de la lune pour intercepter le comte de Guiche.

Cyrano n’est pas une histoire d’amour. Ce n’est pas ‘amour’ que d’aimer en secret ; et il est assez paradoxal, que cet homme, qui fait tout en public, qui n’existe que pour que les autres l’admirent, aime en secret, aime par le biais d’un autre. À croire qu’il avait plus honte de ses sentiments que de son nez… Cyrano n’aime pas Roxane. Cyrano n’aime pas la gloire. Il n’aime même pas son verbe ni même sa lame… Cyrano n’aime tout simplement pas ce monde. Il en aime juste ses images, mais il aspire à autre chose, à plus loin… à la lune.

C’est lui qui est ‘responsable’ de l’introduction du mot « panache » dans la langue anglaise. Et c’est justement ce qu’il emporte dans l’autre monde, « sans un pli et sans une tache’… son panache !

Quand c’est aussi beau, ça en devient grand.


MK Sabir

Le Pavillon d’or, de Yukio Mishima

    Yukio Mishima, figure nietzschéenne par excellence, a voulu écrire comme il vit et vivre comme il pense.

     Pour saisir l’œuvre, il faut d’abord comprendre l’homme. Quand Heidegger enseignait Aristote à ses étudiants, en faisant la biographie du Stagirite, disait seulement ceci : il est né, il a vécu et il est mort. Si la vie d’Aristote était dépouillée d’événements manquants, on ne peut en dire autant de Kimitake Hiraoka, celui-là même qui choisira le pseudonyme de Yukio Mishima.
     Déjà, ce premier fait est marquant, puisqu’en prenant un pseudonyme un écrivain se dédouble, se crée une sorte de doppelgänger. Mais Mishima se refuse à cohabiter avec son double originel ; pas de concessions chez lui, il élève sa vie en œuvre d’art, dès lors, sa vie d’artiste sera indissociable de celle de sa vie d’homme, la première n’étant qu’une sorte de préface à la deuxième.
 
     Toute son œuvre fait la part belle au couple Eros-Thanatos ; en ce sens, on peut le comparer à un Georges Bataille… avec le panache en plus.

      Faisons un saut de quatre décennies et arrivons à sa mort, sa mort qui le rend immortel. Il meurt de la même manière qu’il a vécu, en se mettant en scène. Il se fait seppuku après un putsch manqué contre une base militaire. Putsch manqué mais effet réussi. Car ce qui lui importait ce n’était pas tant de rendre sa dignité à l’empereur du Japon – cela n’était qu’un prétexte – mais de se posséder lui-même. D’être l’auteur de sa propre vie et non pas un simple personnage oblomoviste comme s’en contentent le commun des mortels.

     Arrivons-en maintenant à ce chef-d’œuvre de la littérature mondiale et, à mon sens, le plus grand roman du vingtième siècle (j’entends déjà crier certains au scandale… Quid en effet de Ulysses de Joyce ou encore du Voyage au bout de la nuit de Céline ? Mais ceux-là ne se sont livrés qu’à un exercice de style, certes grandiose, mais un exercice tout de même. Mishima, lui, dans ce livre, comme dans les autres, s’est posé en véritable artiste, et a tenté, non sans succès, d’exorciser l’angoisse liée à la connaissance que l’on va mourir).

     C’est l’histoire d’un jeune moine qui décide (ce mot est important, car contrairement à l’impression que l’on pourrait avoir à la lecture du livre, il n’est pas « possédé » par une puissance supérieure qui lui dicte ses actes ; à l’instar de l’auteur, il PENSE- en effet, le roman est jalonné de kōan, sorte de courtes phrases absurdes et paradoxales qui sont censées conduire jusqu’à l’éveil) d’incendier le temple de Kinkaku-ji de Kyoto.

     La raison d’un tel geste ?

     Le temple était trop beau.

     Lisez… et vibrez.

PARSIFAL, de Wagner

PARSIFAL, de Wagner

De tous les compositeurs, aucun ne m’a influencé autant que Wagner, et de tous les opéras de Wagner, aucun ne m’a touché plus que Parsifal.

Wagner est l’homme de toutes les démesures, de tous les paradoxes et de toutes les incohérences. Ni sa vie, ni son œuvre ne constitue un bloc monolithique ; il a voulu les plaisirs de ce monde comme ceux plus transcendantaux de l’art. Son œuvre est perpétuellement traversée par les événements de sa vie et se déforme au gré de ceux-ci. Pour Ludwig Van par contre, il y a la musique. Et il n’y a qu’elle (même si une fois, il y eut autre chose… mais ceci est une autre histoire). Ainsi, une de ses incohérences a voulu qu’il croit se rapprocher le plus de Schopenhauer, son maître en philosophie, en créant ce Parsifal… mais d’une certaine façon, il y a réussi, du moins, aux yeux de son ancien ami, Nietzsche qui, ayant pris ses distances à la fois avec le penseur de Francfort et le maître de Bayreuth a vu dans Parsifal une véritable abomination.

Je comprends Nietzsche. Et je comprends Wagner. C’est une grande malédiction que de pouvoir comprendre tout le monde, car cela crée à la fois une intimité et une distance toutes deux aussi insupportables l’une que l’autre. Et cela me fait penser, transition facile puisqu’on a parlé de Schopenhauer plus haut, à la théorie de la politesse de celui-ci, aussi appelée la ‘métaphore des hérissons’ : les hérissons doivent se tenir à la bonne distance les uns des autres afin, à la fois assez proches pour ne pas avoir froid en hiver et pouvoir se réchauffer au contact de l’autre, mais aussi en même temps assez loin pour ne pas se piquer les uns les autres.
La politesse, c’est la grande incompréhension de l’Autre.

Nietzsche a lui aussi nourri des sentiments paradoxaux pour Wagner et son œuvre, et cela est surtout flagrant vis-à-vis de cet « abominable » Parsifal ; il écrit à propos du dernier opéra de Wagner : « Il y a des choses semblables chez Dante et nulle part ailleurs ». On a souvent considéré cette phrase comme une appréciation de cet opéra… mais c’est mal connaître celui qui « philosophe avec un marteau ». Comment en effet penser que comparer une œuvre à la Divine Comédie soit un compliment pour l’homme qui annonçait la « mort de Dieu » ?

Mais en même temps, après en avoir entendu pour la première fois le prélude à Monte-Carlo en janvier 1887, il écrit dans une lettre à son ami Peter Gast : « (…) Wagner n’a-t-il jamais écrit quelque chose de mieux ? » et un mois plus tard, il écrit à sa sœur : « Je ne peux pas y pensé sans être violemment secoué, tant cette musique m’a élevé et ému », et enfin, on peut lire dans Le cas Wagner : « j’admire cette œuvre, j’aurais voulu l’avoir écrite moi-même ». Si Nietzsche était un Surhomme en philosophie, il resta un homme en amour, et jamais a-t-il aimé personne plus qu’il a aimé Wagner, c’est pourquoi, jamais il n’a pu en parler ‘sincèrement’ et calmement. Car l’amour n’est pas calme.
Jamais l’amour ne permet d’être objectif… mais Hölderlin est moins pessimiste que moi, puisque pour lui : qui pense le plus profond aime le plus vrai.

Je m’aperçois que j’ai déjà écrit près d’une page sans véritablement parler de l’opéra sur lequel j’étais censé écrire. Je souffre en effet beaucoup de ce mal dont souffrent ceux qui sont passionnés par leurs sujets : la digression.

Dans Parsifal, Wagner tourne le dos à toute son œuvre passée, à toute la mythologie germanique et païenne qui l’a depuis toujours bercé. Plus de Valkyries, plus de dragons, plus de héros homériques qui luttent contre les Dieux et contre leur propre destinée dans une vaine tentative d’être plus qu’un homme.
Parsifal n’est pas un héros, il est même la figure de l’antihéros. Il est ‘innocent’, naïf, et même parfois un peu bête. En somme, il est chrétien, au sens où les derniers seront les premiers. Il ne veut pas ce qui lui arrive, il est l’instrument de forces au-dessus de lui dont il ne fait qu’interpréter la volonté, sorte de prophète, car on le sait, tout bon prophète ne veut pas être prophète, il est choisi en dépit de lui-même.

Mais si cet opéra tourne la page avec tout ce que Wagner a précédemment fait, ce n’est pas pour épouser la doctrine chrétienne de la rédemption. Je ne peux pas le croire, je ne veux pas le croire, et peut-être qu’aveuglé par cette conviction, je déforme les véritables propos du compositeur, mais comme on le sait depuis la physique quantique (depuis bien plus longtemps en fait, depuis Berkeley), l’observateur ‘déforme’ le sujet observé.

Basé sur les romans de Wolfram Von Eschenbach et de Chrétien de Troyes, Wagner parvient à transcender leurs proses grâce à son wortondrama, une unité parfaite entre les mots et la musique, cette musique qui, au moment de l’ascension de Parsifal jusqu’au Graal vous submerge. Une note plus rapide suit une note plus longue et abouti elle-même sur une note plus longue et ainsi de suite, permettant au spectateur d’avoir l’impression de gravir les cimes tant terrestres que spirituels avec le jeune chevalier.

Mais que veut nous dire au juste Wagner ? Il ne le sait pas lui-même. J’ai le romantisme de penser que les œuvres transcendent leurs auteurs. Il sait juste que quelque part, il y a une question à poser, mais il ne sait encore au juste laquelle, et sans doute ne l’aura-t-il jamais su. Et c’est pourquoi, lors de la présentation du Graal au château de Montsalvat, le fait que Parsifal ne pose pas ‘la’ question, le roi Amfortas ne sera pas guéri.

Wagner, vers la fin se fourvoie. Cela me peine de le dire, mais il ne sait pas toujours finir ses opéras, gangréné qu’il est par la volonté de rendre son propos grandiose.

Mais il sait commencer. Et Parsifal commence par ces mots que Gournemans, le doyen des chevaliers adresse à des écuyers : « Allons, réveillez-vous dormeurs ! »


 MK Sabir

L’empire des sens

Depuis l’antiquité grecque jusqu’à Georges Bataille, Eros et Thanatos, le sexe et la mort, sont intimement liés.
D’ailleurs, n’appelle-t-on pas l’orgasme la ‘petite mort’ ? La mort, comme le sexe, est une sublimation de notre condition de mortels.

Un film en particulier a su retranscrire, avec une troublante fidélité, les ébats de ce couple fatal, L’empire des sens. Le titre japonais est Ai no corrida, textuellement, la corrida de l’amour. La métaphore est juste puisque c’est à un véritable combat, qui s’achèvera par la mise à mort de l’un d’entre eux, auquel se livre les deux amants, Sada Abe, une ancienne geisha et Kichizo qui, dans ces ‘amours de fauves’ y perdra la tête… et la bite !

Ce film japonais, de Nahisa Oshima, sorti en 1976, resta pendant longtemps interdit dans certains pays puisque le sexe n’y est pas simulé. Les personnages ne jouent pas à faire l’amour. Ils font l’amour. Alors que pour les gens en général, ils ne baisent pas, ils ‘jouent à baiser’.

Inspiré d’un fait divers authentique qui se déroula au Japon en le 18 mai 1936 et où une femme coupa le pénis de son amant et se trimballa avec dans  les rues d’Ogu, le film montre comment deux personnes font fi des conventions sociales pour aller jusqu’au bout de leur logique qui est, non pas sexuelle (le sexe n’est que le moyen) mais métaphysique.

Selon Saint-Augustin, l’on ne peut pas faire confiance à nos sens. Dans le film d’Oshima, au contraire, ce sont les sens qui deviennent l’horizon de l’être. Le voile de cette illusion qu’est la réalité est levé et le couple va au-delà du principe du plaisir. Hesse l’avait déjà bien illustré dans Narziss und Goldmund où ce dernier en voyant la douleur sur le visage d’une mère qui met au monde un enfant fait le parallèle avec le plaisir qu’éprouve la femme au moment où elle jouit. Ce qu’Oshima a essayé de rendre compte dans le film, c’est que douleur et plaisir se réduisent tous deux à des sensations physiologiques, et celles-ci nous révèlent l’existence. Le film décrit un monde où l’empire des mots s’évanouit (leurs dialogues sont presque inexistants laissant place à un silence angoissant), et où l’emprise du langage expire, ce qui est aussi le corollaire à la disparition de toutes normes, quelles qu’elles soient… la fission du mot est aussi puissante et dévastatrice que la fission de l’atome (au japon cette comparaison est d’autant plus prégnante): les deux amènent à rien de moins qu’à la destruction de la réalité !

Les protagonistes ne vivent pas dans un monde chrétien où les idées platoniciennes règnent ; ils sont conscients qu’ils ont été Geworfenheit, comme dit Heidegger, « projetés » dans ce monde… un monde où il n’existe pas de vérités et de morales universelles, mais où la vérité est aletheia… « dévoilement » de notre être. Aujourd’hui, contrairement à l’époque de Freud, ce n’est plus la sexualité qui est refoulée, mais la « volonté de puissance »… Celle-ci est libérée par la fission du verbe, verbe qui se fait chair… en somme, c’est un peu un mélange entre l’évangile de Jean, et le livre de l’Apocalypse. On peut ainsi dire que le film décrit un microcosme post-apocalyptique et postmoderne… Post-apocalyptique car les protagonistes vivent dans un monde, leur monde, où toute norme est morte, et postmoderne car pour eux, les grands récits ont pris fin !

Il y a une vie après le sexe. Cela s’appelle la folie.

MK Sabir

Et si… l’homme n’avait jamais marché sur la lune ?

Et si… l’homme n’avait jamais marché sur la lune ?


Autant il est aisé d’imaginer les répercussions sur notre vie de tel ou tel événement, il est plus difficile de deviner les conséquences du fait que l’homme ait marché sur la lune sur notre quotidien…

Mais d’abord, l’homme a-t-il vraiment marché sur la lune ?
N’est-ce pas plutôt Kubrick qui aurait filmé toute la scène pour remercier la NASA de lui avoir prêté l’équipement nécessaire au tournage de son film 2001, l’odyssée de l’espace ?

Eh puis, n’est-ce pas troublant que le drapeau américain semble flotter sur cette célèbre photo… alors qu’il n’y a pas de vent sur la lune ?

La NASA elle-même avoue avoir « retouché » certaines images pour des besoins esthétiques ! Si elle est capable de cela, pourquoi ne pousserait-elle pas le zèle encore plus loin et aurait carrément monté ce canular ?

N’oublions pas aussi que Neill Armstrong n’a jamais donné d’interview au retour d’Apollo 11.

Ce qui serait inquiétant, ce ne serait pas de ne pas se poser de telles questions, mais au contraire, ce serait d’accepter la version que nous proposent les grands médias et les grandes puissances pour argent comptant !

Mais mon opinion personnelle (eh oui ! j’ose la donner !) c’est que les américains soient bien allés sur la lune mais qu’à cause de problèmes techniques ils n’aient réussi à filmer cet événement historique et qu’en conséquence la NASA ait décidé de retourner toutes la scène en studios… peut-être ceux de Pinewood !

Donc, partons du postulat que l’homme ait bien mis le pied sur la lune… et alors ? La lune a toujours inspiré les poètes, les romantiques et les amoureux, un drapeau planté sur son sol n’y change rien sinon peut-être la rend moins belle !

Mais la course à l’espace, tout comme la course à l’armement (les deux étant une quête de volonté de puissance) contribuent à la recherche scientifique, au développement de nouvelles énergies… mais surtout, elle nous permet de rêver !

On raconte qu’Alexandre le grand se lamentait qu’il n’y ait pas d’autres mondes afin qu’il puisse y étendre ses conquêtes… L’homme a un besoin irrépressible d’aller voir ailleurs… quel que soit le prix à payer. Il est allé sur terre, sur les mers, sous les mers, et maintenant c’est l’espace. Quand bien même il aurait tout à perdre, il ne pourra réfréner ses élans d’espace !

Sa prochaine destination : Jupiter et au-delà de l’infini ! 
  
MK Sabir

Des Ruminants (petit ode à la femme)

Des Ruminants
(petit ode à la femme)


Le 8 mars le pays a fêté la journée internationale de la femme… et ces mots de Schopenhauer viennent frapper à la porte de mon esprit : la femme est un animal aux cheveux longs et aux idées courtes.

Existe-t-il des femmes qui soient à la fois belles et intelligentes ?2
Assurément ! Puisqu’il existe bien des femmes moches et connes !

Les femmes veulent à la fois le beurre (influencées sans doute par un Dernier Tango à Paris) et l’argent du beurre ; réclamant les mêmes droits et acquis sociaux que les hommes, elles veulent toutefois que ces derniers fassent preuve de galanterie à leur égard ! En somme, l’égalité, oui ! mais teintée de fin amors !

Elles demandent bec et ongles le même salaire, les mêmes privilèges, mais tout en n’étant pas prêtes de se départir de tous ces petits avantages liés au deuxième sexe, tels les congés maternité, les petites attentions des hommes, se faire ouvrir la porte, qu’on leur cède nos places dans le bus, etc., et se plaisent et se complaisent dans ce mal qu’est le bovarysme.

L’argument souvent avancé par la gente féminine est qu’elle est lésée parce que la société dans laquelle on vit et dans laquelle on a toujours vécu est matriarcale ; cependant, il semble qu’elle s’en soit bien accommodée !

Alors, pourquoi de telles revendications ?
Il faut se tourner vers la théorie économique de l’offre et de la demande. Avec l’émergence de la société capitaliste, ce n’est plus la demande qui crée l’offre mais le contraire ; on désire une chose car elle est disponible, plus exactement car « On » (au sens heideggérien de das man) en parle !
Ainsi, un jour sont arrivées quelques femmes frigides et complexées, comme « le castor », et elles ont avancé des idées aussi saugrenues que « l’égalité » (poilant comme notion !) ou ont jeté des phrases péremptoires telles que : « on ne naît pas femme, on le devient », phrase qui n’est en fin de compte qu’un atavisme sartrien.

Quiconque sera familier avec la philosophie nietzschéenne saura que l’égalité n’est qu’un effet secondaire du christianisme et a gangrené toutes les sociétés pour laisser place à une « morale d’esclave » qui a fini par supplanter la « morale des maîtres » qui dominait alors et qui avait permis l’émergence des sociétés athénienne et romaine !

Donc, puisque ces théories féministes existaient, les femmes se sont dites : « Bon sang ! Mais c’est bien sûr ! »
La théorie est là et « On » veut que la pratique la rejoigne, tout comme Edmund Hillary de répondre quand on lui demandait pourquoi il voulait gravir l’Everest : « Parce qu’il est là ! »

Que disait François 1er déjà ? Ah oui ! Souvent femme varie, bien fou celui qui s’y fie.

Baudelaire à Maurice

C’est marrant quand même ! Il a suffit que Baudelaire passe à peine trois petits mois à Maurice, qu’il vide quelques bouteilles de rhums locaux, qu’il se tape quelques ‘dames créoles’ pour qu’aussitôt, comme par l’opération du Saint-Esprit, il soit devenu Mauricien à part entière.

Sommes-nous tellement en manque de grands esprits pour qu’on doive en importer de l’étranger ?
Euh… oui ! nous le sommes.

Baudelaire fait partie de ces grands noms qui ont fait escale sur notre belle île esclavagiste ; il y eut aussi, entre autres, Conrad, Darwin, Bougainville ou Sarkozy (cherchez l’erreur). Sans Maurice, il y aurait-il quand même eu Les fleurs du mal, Cœur des ténèbres ou De l’origine des espèces ? Sans doute pas, en tout cas, pas dans la forme dans laquelle on les connaît. Non pas parce que Maurice a eu une si grande influence sur ces hommes, mais tout simplement à cause du phénomène d’attracteurs étranges et que toute personne qui aura vu Jurassic Park connaît sous le nom de théorie du chaos (mais si ! Rappelez-vous, quand le personnage interprété par Jeff Goldblum tente de séduire Laura Dern en lui prenant la main et lui expliquant comment la goutte d’eau sur la paume de sa main suivra à chaque fois une direction différente).

Mais, et c’est paradoxal (ou tout simplement stupide), Maurice, qui se glorifie d’avoir accueilli (pour ne pas dire « recueilli ») le célèbre dandy, n’a pourtant rien fait pour célébrer sa gloire. La maison où il a vécu est une vielle bâtisse délabrée alors qu’elle aurait pu être reconvertie en musée comme c’est le cas souvent à l’étranger où une plaque dit : « ici a vécu Beethoven entre telle date et telle date » ou, par exemple dans le Sud de la France à Eze-sur-mer, une plaque indiquant un chantier qu’avait l’habitude d’emprunter Nietzsche pour ses balades.

Notre pays ne sait pas capitaliser sur ses atouts culturels et préfère au contraire mettre en avant certaines commémorations qui ne peuvent qu’exacerber les luttes communautaires, alors que Baudelaire, lui, appartient au patrimoine mondial de l’humanité.

Comme tous les grands hommes, il s’est affranchi de sa patrie d’origine, ses vers n’ont aucune connotation nationale, ses valeurs ne sont pas ancrées dans une époque, et sa vision est intemporelle et transcende les frontières. Qui donc, mieux que lui, aurait été à même d’appartenir autant à notre pays qu’à la France ?

Mais ce sont les bustes d’esclavagistes qui trônent un peu partout dans le pays. Ce sont les grands maîtres religieux que l’on célèbre tout au long de l’année, c’est des noms de politiciens dont on baptise divers instituts à travers le pays.

Ce qui est vraiment insupportable c’est le révisionnisme auquel se prêtent certains Mauriciens en donnant une interprétation des Fleurs du mal qui aillent dans le sens d’un patriotisme que Baudelaire méprisait. Certains soi-disant écrivains mauriciens pensent en effet que Baudelaire s’est directement inspiré de notre île pour certains vers ; si on peut en effet le supputer à la lecture de, par exemple Une vie antérieure, le soutenir comme un fait comme si Baudelaire avait écrit noir sur blanc en bas du poème : « écrit sous l’influence de Maurice », reflète une mauvaise foi intellectuelle flagrante.

On peut tout faire dire aux morts puisqu’ils ne sont plus là pour contester.

Les poètes ne sont pas faits pour être commémorés, récupérés aux profits de causes nationales ou chantés dans les écoles tels des mantras. Les poètes sont faits pour être lus. Ils sont les intermédiaires entre les Dieux et les hommes.

Dans la tête du poète, rien n’est luxe, calme et volupté. Tout y est crasse, bruyant et saleté.


MK Sabir

On ne refait pas l’histoire !

Les Européens ont conquis l’Amérique et procédé au génocide des peuples qui s’y trouvaient.
On sait aujourd’hui que tout cela n’était pas très « chrétien » !
Les Européens, toujours eux, ont conquis l’Australie et procédé au génocide du peuple qui s’y trouvait.
On sait aussi, aujourd’hui, que tout cela n’était pas très « chrétien » !

Les Juifs (fallait quand même en parler !) ont conquis la Palestine après la Seconde Guerre et procédé soit à l’apartheid, soit à l’expulsion du peuple qui s’y trouvait.
On sait aujourd’hui (mais tout le monde le sait-il vraiment ?) que tout cela n’était pas très…

Comment remédier aux erreurs (si l’on veut être morale) ou aux aléas (si on ose l’amoralité) de l’histoire ?
 
C’était le douloureux problème auquel est soumis le gouvernement britannique vis-à-vis de la question des Chagos et du sort qui doit être réservé à sa population qui, manu militari, au nom de la Realpolitik, s’est vu forcer, en 1971, par le gouvernement britannique, de s’exiler soit aux Seychelles, soit à Maurice.

Certains, à l’instar de Gillian Merron, plaident pour le retour des Chagossiens à leur terre natale. D’autres, et ils sont les plus nombreux, avancent l’argument néo-colonialiste qui veut que l’on ne « refasse » pas l’histoire.

En effet, pour les Britanniques, les Chagos constituent leur pré carré, au sein du « territoire britannique de l’Océan Indien » ; cette dernière appellation constitue un véritable anachronisme !
Non content d’avoir bradé l’île de Diego Garcia aux américains afin de pouvoir leur acheter au rabais des missiles Polaris, ils prennent aussi en otage toute une population pour des raisons géostratégiques !

Ont-ils donc oublié le principe d’autodétermination qui se trouve au sein de la Charte des Nations Unies de 1945?  Que font-ils donc du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ?
Ont-ils oublié que l’Angleterre elle-même fut occupée par les Romains (relisez Cœur des ténèbres de Conrad) et qu’ils ont sué sang et eau pour empêcher une possible invasion de Napoléon ?

Mais la mémoire des peuples, comme celle des individus, est sélective. Et la mémoire est bien la seule chose, et la dernière, qui reste aux Chagossiens qui doivent se contenter de fleurir des tombes. 18 d’entre eux étaient partis rendre hommage à leurs aïeux enterrés sur l’île. Et ils s’en retournent aujourd’hui avec les fantômes de leurs rêves meurtris.

Si seulement, à Waterloo, Grouchy n’avait pas bouffé de ces foutues fraises !

Mais on ne refait pas l’histoire.


MK Sabir

MULTIPLIEZ-VOUS !

Quand on avait demandé à Saint Augustin ce que Dieu faisait avant de créer le monde, il avait répondu : « il préparait les punitions et tortures à faire subir à ceux qui se poseraient de telles questions » !
Si on demande aux parents ce que faisaient leurs enfants avant de naître, beaucoup pourraient sans doute répondre : ils élaborent les supplices à nous faire subir une fois qu’ils viendront au monde !

On peut alors se demander pourquoi, sachant tous les soucis qui les attendent, certains couples veulent quand même avoir des enfants ; afin de laisser quelque chose après leur mort, puisque tous ne sont pas artistes et qu’ils ne laisseront pas de livres, de symphonies ou de peintures pour les rendre immortels ?
Supputons aussi que ce désir d’enfants peut provenir du fait qu’ils veulent avoir quelqu’un pour s’occuper d’eux lors de leurs vieux jours.
Enfin, thèse la plus téméraire mais en même temps la plus réaliste : un enfant, ça sert à se divertir, au même titre qu’une PlayStation 3 !

C’est là que l’on voit qu’en dépit de 40,000 ans d’évolution, l’homme est demeuré un animal dont le seul dessein est la pérennisation de la race. Toutes ses forces sont dirigées vers ce seul et unique but, de la recherche d’une compagne ou d’un compagnon qui réunirait les caractéristiques nécessaires pour supporter l’éducation de l’enfant, à l’invention de l’amour qui n’est, comme tout bon biologiste le sait, qu’une stratégie de l’instinct. 

Se multiplier, c’est se diviser.

Dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier, on a compté 18 naissances dans les hôpitaux de l’île… je soupçonne certains parents de s’être démenés comme de beaux diables afin de concevoir leur enfant à la date nécessaire pour que celui-ci « éclose » lors de la nuit de la Saint Sylvestre.

En tout cas, au regard de ce que traverse le monde en général, et Maurice en particulier, on peut bien plaindre les nouveau-nés. Et le premier motif pour les plaindre, c’est à cause des noms à la con dont leurs parents vont les affubler ; on peut penser qu’ils vont leur donner le nom des derniers personnages à la mode des séries télévisées ou alors des joueurs de football qui sont tendance ! Hélas, peu sans doute penseront à des noms de grands écrivains et il serait étonnant que l’un des ces dix-huit enfants s’appellera par exemple « Dante » ! On pourrait plutôt s’attendre à des noms comme « Gabi » ou « Bree », des noms des personnages de la série (série qui, par ailleurs, est excellemment écrite et réalisée) américaine Desperate Housewives ; certains pourraient même se laisser aller à baptiser leurs rejetons de « Bauer », de « Jack Bauer », cet agent de la cellule antiterroriste de 24 heures chrono qui n’hésite pas à torturer les méchants suspects pour les faire avouer, et on pourrait même voir surgir sur les actes de naissances un « Cristiano », d’après ‘Cristiano Ronaldo’, l’attaquant du Real Madrid vers lequel il a été transféré pour la somme de 94 millions d’euros.

Donc, voilà dix-huit bouches de plus à nourrir, qui devront, dans les décennies qui viennent, se taper des crises financières, des pandémies de tout genre, gérer les problèmes avec leurs parents, puis dans leurs couples, supporter le prochain film de Luc Besson, entendre les discours impérialistes et hypocrites des prochains présidents américains, écouter les arguments fallacieux des écologistes qui nous prédisent la fin du monde si nous ne cessons pas tout de suite de prendre des douches, et enfin, endurer la sortie du High School Musical 17 en 2020…

Mais tout n’est peut-être pas perdu… les Mayas nous ont prévu la fin du monde pour décembre 2012.

MK Sabir

Je t’emmerde !

L'autre jour, en allant à la banque pour effectuer un retrait d'argent, la personne au guichet s'est permis de me tutoyer!
Je crus d'abord que sa langue avait flanché, mettant cela sur sa mauvaise maîtrise du français, mais elle persistait dans ce tutoiement plébéien à la soviétique!
Une fois qu'elle m'avait remis mes billets, je lui fis la remarque; et elle eut l'outrecuidance de me répondre: « Mais c'est parce que notre banque (dont je tairais le nom, mais qui est constitué de quatre sigles, le premier renvoyant à une ville en Asie) se veut amicale avec les clients! »

Il va de soi que si j'y étais allé en costard cravate, elle m'aurait donné du « vous » et du « monsieur »! Mais à Maurice, sévit dans les sphères bureaucratiques une discrimination envers certaines classes sociales. On se permet de prendre de haut des personnes que l'on considère inférieures à soi, soit en raison de leur position, de la langue qu'elles parlent ou à cause de leur manière de se vêtir, tout en attendant de cette même personne qu'elle vous considère avec diligence et respect!

Et ce genre de personnes, qui osent péter plus haut que leurs culs, doit être remis à sa place.
Mais peu de Mauriciens osent bousculer l'ordre établi; ils préfèrent se complaire dans une certaine hiérarchie, par peur du qu'en dira-t-on... et sans doute, aussi, se considérant eux-mêmes comme inférieurs à leurs interlocuteurs.

Considéré sous l'ancien régime comme grossier, le tutoiement fut rendu obligatoire par un décret des révolutionnaires afin d'encourager une pratique égalitaire, illustrant le lien universel entre tous les êtres.

Mais, non seulement l'égalité est-elle une superstition, voire une supercherie, mais en plus, le but premier qui était de combattre la discrimination a complètement était dénaturé!
En effet, le vouvoiement demeurant, le tutoiement est, au contraire, devenu un moyen de rabaisser l'interlocuteur.
Si le vouvoiement n'avait plus cours, alors, oui, le tutoiement universel serait un outil de nivellement (quand bien même tout nivellement est synonyme de société totalitaire); toutefois, aujourd'hui, le « tu » est utilisé dans certaines professions, notamment dans la fonction publique, afin d'inférioriser l'autre, tel que pratiqué par exemple par les policiers ou toute autre personne occupant une position de pouvoir.

De plus, la distinction « Tu-Vous » permet de promouvoir une certaine intimité et de mettre une distance avec les autres. Une telle distinction encourage donc le locuteur à faire un choix, non seulement linguistique, mais aussi sentimental.
Ainsi, elle est synonyme de liberté!

Alors, lecteurs, vous qui êtes avides de justice, vous qui êtes révoltés par le comportement néo-colonialiste de tous ceux qui vous prennent de haut, n'hésitez pas, n'hésitez plus! Dès que l'on vous tutoiera, répondez: « Je t'emmerde »...

Pardon! Je voulais dire: « Je VOUS emmerde! »


MK Sabir